Les essais cliniques randomisés apportent de bonnes nouvelles concernant le remplacement valvulaire aortique par voie chirurgicale

L’implantation valvulaire aortique par cathéter (TAVI) est utilisée depuis plus de 20 ans. Qu’avons-nous appris sur ces performances, comparées au remplacement chirurgical valvulaire à cœur ouvert ? Cette revue à moyen terme de trois essais cliniques démontre d’excellents résultats et dissipe les craintes selon lesquelles les valves prothétiques utilisées dans la TAVI pourraient être moins durables que celles utilisées dans la chirurgie.

La maladie valvulaire cardiaque est l’une des maladies cardiovasculaires les plus fréquentes et touche plus d’un million de personnes (soit 3,5 % de la population au Canada). L’incidence de la maladie valvulaire cardiaque devrait croître de manière exponentielle dans la prochaine décennie en raison du vieillissement de la population. La sténose aortique, qui est un rétrécissement de la valve aortique, l’une des quatre valves cardiaques, est la maladie valvulaire cardiaque la plus fréquente. Cette maladie est directement responsable de 3 000 décès et de 10 000 interventions chirurgicales au Canada chaque année. Jusqu’à présent, aucun médicament ne s’est avéré efficace pour ralentir ou stopper la progression de la maladie valvulaire cardiaque. La seule option pour traiter une sténose sévère de la valve aortique est donc de remplacer la valve aortique défaillante par une prothèse valvulaire cardiaque, généralement une bioprothèse.

Pendant de nombreuses décennies, le traitement standard de la sténose aortique a consisté à réaliser une chirurgie à cœur ouvert pour remplacer la valve aortique par une prothèse valvulaire. Cependant, il y a environ 20 ans, un nouveau traitement révolutionnaire a été introduit, qui est l’implantation d’une bioprothèse valvulaire par cathéter, donc sans chirurgie. Il s’agit de l’implantation valvulaire aortique par cathéter (TAVI pour transcatheter aortic valve implantation). La TAVI est une option de traitement aussi efficace et moins invasive que la chirurgie. Plusieurs essais cliniques randomisés ont été menés au cours des deux dernières décennies pour valider cette nouvelle technologie pour un usage clinique.

Les essais cliniques ont testé différents éléments

Ces essais cliniques ont d’abord été réalisés chez des patients présentant un risque chirurgical élevé ou extrême, puis chez des patients présentant un risque chirurgical intermédiaire, et plus récemment chez des patients présentant un faible risque chirurgical, représentant environ 65 % de la population nécessitant un remplacement de la valve aortique. Il existe deux principaux types de prothèses valvulaires pouvant être utilisés pour la TAVI : les prothèses valvulaires expansibles par ballonnet et les prothèses valvulaires auto-expansibles. Les essais cliniques menés chez des patients présentant un faible risque chirurgical comprennent :

  • PARTNER 3 qui compare la TAVI avec une prothèse valvulaire expansible par ballonnet à la chirurgie

  • EVOLUT-LR qui compare la TAVI avec une prothèse valvulaire auto-expansible à la chirurgie 

  • NOTION qui compare la TAVI avec la première génération de prothèses valvulaires auto-expansible à la chirurgie

Les résultats principaux de ces trois essais ont été rapportés précédemment et le point d’aboutissement principal était le taux de mortalité, d’accident vasculaire cérébral et de réhospitalisation pour cause de complication cardiaque à un ou deux ans de suivi. Le but de ce rapport est de décrire les résultats de ces essais à un suivi de cinq ans pour PARTNER 3, quatre ans pour EVOLUT-LR et dix ans pour NOTION.

Les résultats du suivi sont positifsHaut du formulaire

Dans l’ensemble, les taux de survie dans ces essais étaient excellents, similaires dans les deux types de remplacement de la valve aortique, et similaires à ceux de la population générale du même âge et sans maladie cardiaque. Le taux d’accident vasculaire cérébral était également faible et similaire dans les deux groupes. Le taux de réhospitalisation pour cause de complication cardiaque était plus faible dans la TAVI par rapport à la chirurgie au cours de la première année de suivi, mais était similaire dans les deux groupes par la suite.

Dans l’essai PARTNER 3, le pourcentage de patients en vie et en bonne santé, c’est-à-dire les patients en vie à cinq ans et ayant une bonne qualité de vie, était élevé et similaire dans les deux groupes : 71 % avec la TAVI contre 72 % avec la chirurgie. Le taux de défaillance de la prothèse valvulaire était faible et similaire dans les deux groupes à cinq ans : 3,3 % avec la TAVI contre 3,8 % avec la chirurgie.

Les trois essais ont démontré une excellente durabilité de la prothèse valvulaire et similaire dans la TAVI par rapport à la chirurgie. Cependant, la durée de suivi du PARTNER 3 et d’EVOLUT-LR était limitée à cinq ans, ce qui n’est pas suffisant pour tirer des conclusions définitives concernant la durabilité à long terme des prothèses valvulaires TAVI.

L’essai NOTION, en revanche, avait un suivi de dix ans et a rapporté une durabilité similaire et excellente des prothèses valvulaires TAVI par rapport aux prothèses valvulaires chirurgicales. Cependant, les patients de l’essai NOTION étaient plus âgés (> 80 ans) et avaient par conséquent une espérance de vie plus courte, avec seulement 35 % de ces patients encore en vie à dix ans. De plus, il est important de souligner que les valves prothétiques utilisées dans cet essai ne sont plus en usage. Les résultats de l’essai NOTION doivent donc être confirmés par d’autres essais.

Les taux de complications varient

En ce qui concerne les autres complications, certaines étaient plus fréquentes dans la TAVI et d’autres plus fréquentes dans la chirurgie. En particulier, la thrombose valvulaire, c’est-à-dire la formation de caillots sur la prothèse valvulaire, était plus fréquente avec la TAVI mais était souvent réversible avec traitement et sans complication pour le patient. Le taux d’apparition de fibrillation auriculaire, un trouble du rythme cardiaque se manifestant par des battements irréguliers et rapides du cœur, était plus élevé chez les patients ayant subi une intervention chirurgicale. D’un autre côté, les saignements graves étaient plus fréquents avec la chirurgie. Dans l’essai EVOLUT-LR, qui a utilisé une prothèse valvulaire auto-expansible, le taux d’implantation de stimulateur cardiaque (pacemaker) était plus fréquent avec la TAVI par rapport à la chirurgie.

Des résultats excellents dans l’ensemble

En résumé, ces trois essais cliniques ont révélé qu’à moyen terme, la TAVI se compare favorablement au traitement standard, c’est-à-dire au remplacement valvulaire chirurgical avec d’excellents résultats pour les deux types de traitement en termes de survie, de durabilité de la prothèse valvulaire et d’autres complications.

Lorsque la TAVI avait été introduit dans la pratique clinique, des préoccupations avaient été émises selon lesquelles ce type de prothèse valvulaire serait moins durable que celles utilisées pour le remplacement valvulaire chirurgical. Ces préoccupations initiales n’ont pas été confirmées par les résultats du suivi à moyen terme de ces récents essais. La durabilité de la valve TAVI semble, en effet, excellente et similaire, voire même légèrement meilleure, par rapport aux valves chirurgicales. Cependant, il ne s’agit pas d’une conclusion définitive et un suivi à plus long terme est nécessaire pour confirmer si la durabilité de la TAVI est équivalente ou supérieure à celle de la chirurgie.

De plus, les femmes représentaient seulement un tiers des patients inclus dans les essais cliniques PARTNER 3 et EVOLUT-LR et d’autres essais cliniques sont donc nécessaires pour confirmer ces résultats chez les femmes. À cet effet, les résultats primaires de l’essai clinique RHEIA qui compare la TAVI et la chirurgie chez les femmes avec une sténose aortique sévère seront présentés au cours de 2024.

Implications pour les personnes vivant avec une sténose de la valve aortique

Tout d’abord, il est important de déterminer le moment optimal de l’intervention de remplacement valvulaire pour chaque patient. Un suivi annuel ou tous les six mois, idéalement réalisé dans une structure ou une clinique dédiée par une équipe de spécialistes des maladies valvulaires cardiaques, est nécessaire pour déterminer le meilleur moment pour intervenir. Pour les patients référés à un centre spécialisé en traitement des maladies valvulaires cardiaques en vue d’une intervention sur la valve aortique, la prochaine étape consiste à décider quel est le meilleur type de remplacement, c’est-à-dire la chirurgie ou la TAVI, ainsi que le meilleur type de prothèse valvulaire. Ce processus devrait être une décision partagée entre les médecins traitants, les professionnels de la santé, les spécialistes en maladie valvulaire cardiaque et également et surtout : les patients, leur famille et leurs aidants.

Plusieurs facteurs doivent être pris en compte pour choisir entre une chirurgie ou une TAVI :

  • l’âge du patient

  • le risque chirurgical du patient

  • l’espérance de vie ainsi que le mode de vie et les préférences du patient.

Chez les personnes âgées de plus de 80 ans et/ou présentant un risque chirurgical élevé, la TAVI est généralement préféré à la chirurgie. Chez les patients de moins de 65 ans avec un faible risque chirurgical, la chirurgie est, en général, préférée à la TAVI. Chez ceux âgés entre 65 et 80 ans et/ou présentant un risque chirurgical intermédiaire, la décision entre la chirurgie et la TAVI doit prendre en compte d’autres facteurs et, en particulier, les préférences du patient.

En conclusion, la chirurgie et la TAVI sont deux excellentes options durables pour les personnes souffrant de sténose aortique sévère et présentant un faible risque chirurgical. Les patients doivent avoir une voix et un poids importants dans la prise de décision entre la chirurgie et la TAVI et sont encouragés à exprimer leurs préférences en fonction de leur mode de vie et de leurs aspirations suite à l’intervention.

Messages à retenir :

  • La chirurgie et la TAVI sont tous deux d’excellentes options durables pour les personnes atteintes d’une sténose aortique sévère et présentant un faible risque chirurgical.

  • Le mode de vie du patient et ses préférences devraient être pris en considération lors du choix de l’intervention à proposer au patient (chirurgie c. TAVI). 

Ce rapport a été préparé pour Une voix aux maladies valvulaires Canada par John Stott (patient), Sébastien Hecht (candidat au doctorat*), Marie-Ange Fleury (candidate au doctorat*), Nancy Côté (Ph. D., chercheuse adjointe*) et Philippe Pibarot (D.M.V., Ph. D., FAHA, FACC, FESC, FASE, FCCS, directeur de la recherche en cardiologie et professeur à la faculté de médecine*).

*Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec - Université Laval, Québec (Québec), Canada.